«Trisha A. Whesker && Aymeric Logan»
   

   Ça fait, quoi, à peine deux semaines que je suis là? Et je veux déjà repartir. Ici, c'est l'enfer. Jamais je ne me serais douté de cela, et pourtant! Bien entendu, je suis seule dans cette histoire. Pour les autres étudiants, les professeurs, bref, pour tout le monde, tout à l'air normal. Je ne comprends pas.... Bon, je sais que je suis différente, très différente, des autres, mais tout de même, comment se fait-il que personne ne se rende compte de ce qui se passe ici? Ça me dépasse. Les premiers jours, ça été correcte. Jusqu'à ce qu'ILS se rendent compte que je pouvais les voirs, qu'ils pouvaient communiquer avec moi. À partir de là, ça été l'enfer. Je suis bombardé, harceler, de tout les côtés, je ne peux même plus dormir en paix. Ça, c'est sans compter les éternels migraines qui m'assaillent. Je ne sais même pas si je vais réussir à finir mon année, moi qui vient à peine de la commencer. C'est juste...insupportable. J'ai l'impression de me trouver dans le purgatoire et d'entendre les milliers d'âmes hurler leur douleur et leur rage. Ma tête est lourde et atrocement douloureuse, mes oreilles bourdonnent désagréablement.
       «TU NE DEVRAIS PAS ÊTRE LÀ....CE N'EST PAS BON POUR TOI. ILS VONT FINIRENT PAR TE TUER...»
Je sursautai brusquement au son de la voix, trop familière et pourtant étrangère à la fois. Je tournai la tête vers ma gauche, posant mon regard perçant sur la silhouette qui se trouvait à mes côtés. Je me trouvais à la lisière de la forêt, je voyais les arbres me dominés et je sentais l'odeur de la mort, loin devant moi. Il y avait un cimetière là, de toute évidence. Ça pulullait de morts qui m'attiraient irrépressiblement vers leur lieu de repos. Je frissonnai violemment.
       «QU'EST-CE QUE TU FAIS LÀ? TU NE DEVRAIS PAS ÊTRE ICI....TU ES....LOIN DE CHEZ TOI.»
Me contentais-je de répondre en fixant mon regard dans celui de Jamie McTavish. J'avais connu Jamie en Écosse, alors que je rendais visite à ma tante. Il s'avérait que Jamie, décédé depuis une dizaine d'années lors de notre rencontre, veillait sur son frère, Darren, qui se sentait coupable de sa mort. Le jeune fantôme posa ses yeux noirs dans les miens, me souriant tristement. Mon cœur se serra brutalement.
       «NE ME DIS PAS QUE QUELQUE CHOSE EST ARRIVÉ À DARREN!»
M'exclamais-je brusquement. Je n'avais pas vraiment connu Darren, à part la fois où il m'avait envoyer balader, la journée où j'avais rencontré son défunt frère. N'empêche, à la seule idée que le jeune écossais puisse avoir eu quelque chose...Mais, heureusement, Jamie ricana doucement en secouant la tête.
       «NON, NE T'EN FAIS PAS POUR ÇA. IL VA BIEN. EN FAIT...IL EST ICI.»
Je fronçai les sourcils, intrigué. Comment....? Vraiment? Il partait d'Écosse pour venir dans ce trou à rat? C'était à ne rien y comprendre! Bien sur, personne ne voyait la chose de la même manière que moi; pour le commun des mortels, Landhon College était l'école la plus populaire à ce jour et tout le monde venant des quatre coins du monde venaient s'y installé. Poussant un petit soupir, je détournai brièvement le regard de Jamie pour contempler les profondeurs de la forêt qui s'étendait devant moi. Le fantôme vint se placé face à moi, posant ses mains sur mes épaules, se penchant légèrement pour me regarder droit dans les yeux.
       «TU NE DEVRAIS PAS T'APPROCHER AUTANT D'ICI....C'EST TROP DANGEREUX...»
Je le dévisage de nouveau, un sourcils relevé avec suspicion.
       «TU T'EN FAIS POUR MOI MAINTENANT?»
C'est à son tour de me dévisager et il se relève, triturant sa lèvre de ses dents. Il semblait nerveux, ou gêné? Possible.
       «EN TOUT CAS, JE SUIS CONTENTE DE TE VOIR ICI...JE ME SENS MOINS SEULE ET PLUS....EN SÉCURITÉ. ÇA ME FAIT DU BIEN DE VOIR UN VISAGE FAMILIER.»
Le jeune homme me sourit sincèrement et il rit tout doucement, hochant la tête à l'affirmative.
       «PAREIL POUR MOI. JE SUIS SOULAGÉ DE SAVOIR QUE DARREN NE SERA PAS SEUL À L'ÉTRANGER.»
Ce fut à mon tour de mordre ma lèvre, un peu mal à l'aise. J'étais touché de l'attention de Jamie, et j'aurais aimé pouvoir aider son frère à s'intégrer mais, d'un côté, je n'avais pas trop envie de revoir Darren, après l'accueil dont il m'avait gratifier quelques années auparavant. D'un autre côté, avec tous ces fantômes dans les alentours, je n'étais pas sur de rester moi-même très longtemps.
     «JE....JE SUIS DÉSOLÉ, JAY, JE....J'AURAIS BIEN AIMÉ POUVOIR T'AIDER, AINSI QUE DARREN, MAIS....JE NE SUIS MÊME PAS CERTAINE DE RESTER MOI-MÊME....AVEC TOUT ÇA...»
Fis-je avec un geste vague vers la forêt et les alentours. James fronça de nouveau les sourcils, plus inquiet qu'autre chose. Il me prit doucement par le coude et m'amena à l'écart, me faisant prendre place sur un petit banc de bois. Il s'assit à mes côtés, me regardant gravement.
       «QU'EST-CE QUI ARRIVE? ILS T'ON FAIT DU MAL?»
S'enquit-il doucement, posant ses coudes sur ses genoux, se penchant vers l'avant pour me regarder droit dans les yeux. Esquissant un petit sourire, j'adoptai la même position que lui, mon visage ne se trouvant qu'a quelques centimètres du sien.
       «OUI ET NON. PAS PHYSIQUEMENT, EN TOUT CAS...POUR LE MOMENT. SEULEMENT, QUAND IL Y A UN ESPRIT QUI SE MANIFESTE, JE SUIS PRISE AVEC UNE IMMENSE MIGRAINE ET C'EST RÉGULIÈREMENT ARRIVÉ QUE J'EN PERDE CONNAISSANCE. ILS ME HANTENT MÊME LA NUIT, DANS MES CAUCHEMARS. J'EN SUIS MÊME À ME DEMANDER S'ILS NE PROVOQUENT PAS MES PERTES DE CONSCIENCES POUR S'IMMISCER DANS MON ESPRIT ET ME HARCELER...»
Je me tus subitement en voyant l'air horrifié de Jamie, qui me contemplait, les yeux exhorbités, la bouche grande ouverte.
       «JE TE FAIS ÇA MOI?»
N'étant pas certaine de saisir le sens de sa question, je mis un certain temps avant de répondre avec empressement :
       «NON! NON, PAS DU TOUT, NE T'INQUIÈTES PAS! EN FAIT, TU ES LE SEUL DONT LA PRÉSENCE M'EST SUPPORTABLE...ET AGRÉABLE, DE SURCROÎT.»
Le visage du fantôme se détendit d'un coup et il sourit. J'embrassai les alentours du regard, me rendant brusquement compte de quelque chose, d'un détail qui m'atteignit comme un fouet. Je reposai vivement mon regard sur l'écossais, le dévisageant longuement, encore une fois. Ce dernier, étonné, sursauta légèrement, soudainement mal à l'aise.
       «QUOI? QU'EST-CE QUE J'AI FAIS?»
       «TU N'ES PAS....COMME LES AUTRES. NON SEULEMENT TU NE ME CAUSE RIEN DU TOUT, MAIS TU BLOQUES LES AUTRES AUSSI....COMME UN GENRE DE TALISMAN. JE N'ENTENDS RIEN, JE NE RESSENS RIEN....»
Jay me dévisagea longuement à son tour, perplexe. Il ouvrit les lèvres, comme s'il s'apprêtait à dire quelque chose, puis la referma. Il pinça les lèvres, puis ouvrit la bouche à nouveau.
       «JE NE COMPRENDS PAS....»
Je détournai le regard de nouveau, finissant par secouer la tête. Peut-être n'étais-ce qu'une coïncidence, après tout...C'était fort possible. Je ne l'avais vu que quelques fois, en Écosse, et ce n'était pas là où j'avais eu le plus d'hallucinations. Pourtant, juste avant qu'il n'arrive, je les sentais, aussi tangibles que des humains et puis, POUF! Plus rien. Je ne croyais pas aux coïncidences, toutefois, je ne voulais pas donner à Jamie une charge trop lourde....Je n'avais pas envie qu'il s'inquiète pour moi et qu'il se sente obligé d'être en permanence à mes côtés pour m'empêcher de souffrir.
       «NON, LAISSE TOMBER. JE DOIS JUSTE....ÊTRE FATIGUÉE. JE N'AI PRESQUE PAS DORMI DEPUIS QUE JE SUIS ICI.»
Le rouquin hocha doucement la tête puis posa une main dans mon dos. Il posa un bref baiser dans mes cheveux avant de caresser ces derniers avec douceur.
      «SOIT PRUDENTE, TRISH'. JE NE VEUX PAS QU'IL T'ARRIVE QUELQUE CHOSE...SI JAMAIS TU AS BESOIN DE MOI, N'HÉSITES PAS À M’APPELER, JE VIENDRAI AUSSITÔT.»
Je hochai doucement la tête à mon tour, le gratifiant d'un léger sourire, puis je me levai en même temps que lui. Je n'eus pas la chance de le regarder partir, il se volatilisa littéralement, me laissant seule. Instantanément, la douleur dans ma tête m'assaillit à nouveau, brutalement, m'arrachant une plainte sourde alors que mes genoux flanchaient sous moi et que je me retrouve à quatre pattes au sol. Ma vue se voilà, ma tête m'élança....Ça y est, j'allais perdre connaissance....Ou pas.
       «HEY! HEY, ÇA VA? TU M'ENTENDS? QU'EST-CE QUI NE VA PAS?»
Je ne connaissais pas la voix, mais elle me permit de me raccrocher, de rester consciente. Les voix s'estompèrent un peu, de même que la douleur, mais je fus incapable de me lever.